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11/06/2014

Enigme romane

 

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   La fresque que l'on entrevoit ici se situe dans l'église romane de Brancion. Vous aussi, vous vous demandez qui est ce personnage, avec toutes ces petits bonshommes qu'il tient dans un drap ? Eh bien, on l'identifie à Abraham.

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Avouons que ce type de représentation, quoique traditionnel (cf. ci-dessus, à Saint-Omer), a de quoi surprendre... à tel point que le site sur lequel la photo de la fresque a été trouvée affirme que cette fresque illustre « la pesée des âmes » ! Une telle interprétation s'explique aisément : le thème de la pesée des âmes figure déjà dans la religion de l'Egypte ancienne, et le portail du Jugement dernier de Notre-Dame de Paris l'illustre également (cf photo ci-dessous).

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Mais il s'agit ici d'une fausse piste. On ne voit pas trop le sens que pourrait prendre une pesée collective des âmes dans le cadre d'une religion qui enseigne qu'après sa mort, l'homme est jugé de manière individuelle. Car notez bien que sur chaque plateau de la balance représentée à Notre-Dame, on n'aperçoit qu'un seul individu. Alors qu'une multitude de personnes a l'air de se blottir dans cette espèce de linge tendu par le patriarche. Il faut donc enquêter dans une autre direction...

   Si l'on cherche un peu à quel épisode biblique cette fresque peut faire référence, on pense bien vite à la parabole du mauvais riche et du pauvre Lazare (Luc 16, 19–31). Saint Luc nous précise qu'après leur mort respective, le mauvais riche, « en proie aux tourments », voit « de loin Abraham, et Lazare dans son sein » (Luc 16, 23). À y regarder un peu vite, le rapport entre la fresque et le texte paraît superficiel : quel rapport entre un sein et un drap ? Eh bien, le mot grec utilisé dans l'évangile est κόλπος, que l'on peut traduire à la fois par « poitrine » et par « pli du vêtement ». On relève la même ambiguïté avec le terme latin « sinus », que saint Jérôme emploie dans la Vulgate à cet endroit. Nous comprenons « sein » là où nos ancêtres entendaient « pli du vêtement ». Qui a raison ? Difficile à dire...En tout cas, les artistes romans, à partir du cas du pauvre Lazare, ont considéré cette image du vêtement dans lequel on peut se blottir comme une représentation adéquate de l'éternité bienheureuse.

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